Comme promis, je
reviens sur le sujet. Dans un premier temps, j'envisageais un commentaire, disons "catho-spi" sur le thème "Charité & Vérité". A la réflexion ( le repos et la distance ont du bon !),
j'ai abandonné cette piste, proposant à chacune et chacun de (re)lire la magnifiqueencyclique de Benoît XVI : "Caritas in Veritate" : hormis le fait que cette exhortation est d'actualité,
elle émane du pape qui, pour toutes les sensibilités cathos, est le rassembleur et le pasteur par excellence.
Non, ce que je propose, c'est plutôt la réflexion d'un laïc quant au bien fondé ou pas de la mobilisation initiée par Civitas, aux réactions que celle-ci a suscitées, en particulier chez les cathos, blogueurs et/ou commentateurs, au devenir de cette mobilisation au regard de la fécondité de celle-ci et du bien commun.
Bien fondé ou pas de la mobilisation initiée par Civitas.
Il y a lieu de prendre d'abords en compte que cet institut est une association déclarée et à ce titre a légalement le droit
d'intervenir dans le champ public comme elle l'entend : envisager ne serait-ce que le début d'une interrogation à ce sujet constituerait une menace sur la liberté d'expression.
La question centrale est : cette action est-elle légitime ? Et, ce n'est pas accessoire, est-elle opportune et "adaptée"
par rapport à la christianophobie que dénonce cet institut ?
Légitime, certainement( en précisant que je n'appartiens pas à cette mouvance mais que j'y ai des
contacts). L'analyse de la pièce en question par Civitas, dont on voit bien que les interprétations sont très différentes ( cf les commentaires sur le billet " Réflexions à propos de la christianophobie
3") est d'affirmer qu'elle constitue a minima une agression. Le fait que la pièce jouée à Paris ait quelque peu évolué ( supression du caillassage du visage du Christ par 12 enfants
( 12, un chiffre au hasard ?) est plutôt de nature à rendre plausible cette analyse. Par ailleurs, et on ne le répètera jamais assez, les laïcs chrétiens sont tout à fait libres
d'agir comme ils pensent devoir le faire, sans avoir à être mandatés par quelque autorité que ce soit, à partir du moment où ils agissent dans leur sphère de responsabilité. Que cela plaise ou
pas, c'est ainsi qu'il faut voir la liberté citoyenne d'une part et la distinction des pouvoirs temporel/spirituel d'autre part.
Opportune ? La christianophobie, comme je l'ai déjà écrit, n'est pas un phantasme. Je ne donnerai qu'un exemple,
étant plutôt attentif sur ce dossier : le hellfest. Pas moins de 30% de groupes anti-chrétiens et/ou satanistes programmés cette année avec le financement généreux des collectivités
territorriales ! Que ceux qui ont des oreilles entendent ! Il est temps que l'opinion prenne conscience de cette réalité et qu'elle soit portée dans le champ public.
Adaptée ? Une pétition puis une manifestation contre, on peut, à juste titre, se demander si c'est un mode
d'action adéquat. Je dirais 2 choses à ce propos :
1ère chose : les opposants des derniers jours à cette initiative, qu'ont-ils proposé entre le moment de
l'annonce de cette celle-ci et le début de la protestation publique ? Qu'ont-ils pris comme initiative, y compris en direction de cet institut et de son responsable ?
2ème chose : Civitas, de son côté, a t-il cherché à élargir son regard dans l'analyse qu'il faisait de la pièce (
y voyant un blasphème quand d'autres ne le voient pas ) ainsi que dans le mode opértoire avant de le mettre à exécution ?
Pour ma part, une pétition et une protestation publique, sur un sujet pareil, ne me semblent pas condamnables et d'autre part ont
le mérite d'exprimer publiquement une opinion et des réalités mises le plus souvent sous le tapis. Mais encore faut-il qu'elles ne soient pas instrumentalisées.
Mais il y a plus. Nous ne pouvons en effet nous "contenter" de protester, il faut aussi "construire"
et "proposer". Pour avoir moi-même dans une autre vie organisé expositions d'oeuvres d'art, colloques et concerts, je sais la difficuté de ces opérations mais aussi leurs fécondités. Il
faut donc à la fois poser des NON mais aussi des OUI.
Et pour être tout à fait franc, je trouve qu'il faut du courage et de la Foi à ces catholiques qui depuis plusieurs jours
maintenant se rassemblent et qui ne sont pas tous, loin de là, de la mouvance "civitas" : il y a lieu de ne pas les oublier.
Réactions que celle-ci a suscitées, en particulier chez les cathos, blogueurs et/ou
commentateurs.
Notons tout d'abords, parce qu'il faut être honnête, que la polémique a démarré VRAIMENT suite aux
perturbations occasionnées par quelques activistes du renouveau. Je le dis tout net : si sur le curseur de la violence, cette intrusion dans la salle et les quelques oeufs jetés sur le
public serait plutôt à mettre au niveau 2 voire 1 sur une échelle de 10, il n'en reste pas moins que ce n'est pas acceptable.
Dès le lendemain, les médias peu scrupuleux se sont déchaînés et des centaines de jeunes ont été interpellés lors des
manifestations sur site ( je passe sur l'abjection du ministre de la culture osant comparer ces chrétiens à des fondamentalistes ).
Sur cette affaire, différentes prises de position se sont manifestées et dont "Le salon beige" et "Nouvelles de France", plus spécialement, ont rendu
compte. Je retiens quant à moi plus spécialement celles de Myriam PICARD, Hélène JULIEN, Jacques de GUILLEBON, pour ne retenir que des laïcs, et dont vous pouvez découvrir les avis sur les médias
sus notés.
Ce qui m'a frappé, c'est que dans cette histoire :
la dialectique et l'idéologie l'ont bien souvent emporté sur l'objectivité et l'analyse des faits,
l'origine de la protestation ( civitas) a été bien souvent préférée à l'objet ( la pièce) en rappelant que celle jouée à
Paris a évolué,
Les prises de bec, y compris entre chrétiens, n'ont pas manqué,
Les propos et prises de position plus que regrettables d'autorités religieuses parlant pour l'une à propos des priants
manifestants "d'idiots sympathiques", pour une autre prenant pour argent comptant les propos de l'auteur de la pièce et en en faisant même la pub sur le site de son diocèse.
Devenir de cette mobilisation au regard de la fécondité de celle-ci et bien
commun
Chacun le sait, cette pièce est programmée ailleurs ( Rennes la semaine prochaine) et est
suivie d'une autre ("Golgotha Picnic") qui pour le coup semble recueillir un avis unanime quant à sa christianophobie.
J'ai lu cette tribune dans "le monde"qui veut poser des fondements au devenir de
cette protestation : j'ai été quelque peu déçu par le fait que ses auteurs posent comme postulat que les protestataires se sont trompés dans l'analyse de la pièce et
qu'ils aient "négligé" la responsabilité des autorités publiques dans cette affaire. Par contre, je ne peux qu'adhérer à cela :
"La question qui se pose, au fond, est simple et essentielle : voulons-nous laisser notre société se scinder en plusieurs groupes qui s'ignorent et se craignent ? Face à ce
danger, une seule voie est possible : nous devons accepter de renouer un vrai dialogue, risquer l'aventure de l'écoute, de la confiance et de l'échange rationnel
autour de la question de la foi. Oui, il est urgent de reparler ensemble de la question de Dieu, de lui donner de nouveau toute sa place dans notre culture commune et dans nos
échanges publics". Une question aux auteurs : ce dialogue, l' envisagent t-ils y compris avec la fraternité saint Pie X et/ou Civitas ?
J'ai lu aussi cet appel de Mohammed-Christophe Bilek, musulman converti au catholicisme et fondateur du site Notre-Dame de Kabilye
:
"Un livre ou une œuvre d’art qui n’est pas produit pour éduquer, ou informer, ou réveiller, à quoi ça sert ? Si l’auteur dit que c’est pour se faire de l’argent,
l’affaire est entendue : s’y rend ou le lit qui veut, mais en connaissance de cause. Mais si l’auteur dit ceci : « Et tout est ambigu dans Sur le concept
du visage du fils de Dieu : Jésus, la merde, qui est aussi de la lumière... » ..."Mais faut-il manifester notre désapprobation ? Et de quelle manière ? [...] On cite volontiers sa
recommandation, « si on vous gifle sur la joue droite, tendez la joue gauche » (Mt 5,39), mais on oublie de mentionner sa mise en application,
par Jésus lui-même, et que nous avons en st Jean 18,23 : « Jésus lui dit : Si j'ai mal parlé, fais voir ce que j'ai dit de mal ; et si j'ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? »
Nous avons juste à dire cela, bien en face de l’insulteur, en restant ferme mais non violent : Jésus nous apprend donc qu’il ne faut pas rendre « la monnaie de la pièce », mais qu’il est
de notre devoir de protester face à l’injustice qui nous est faite. Actuellement nous sommes trainés dans la boue, en tant que catholiques particulièrement, mais en tant que chrétiens en
général. Celui qui n’arrive pas à ce constat est aveugle. En même temps il ne faut pas s’en étonner : le Christ a été persécuté et nous, ses disciples, nous sommes logés à la même enseigne. Nous
pouvons le déplorer ; ou se réjouir de souffrir pour notre Seigneur, car notre récompense sera grande dans le Ciel ; dans tous les cas nous
sommes invités à protester publiquement et librement, sans aucune peur. MAIS À LA MANIÈRE DE JÉSUS. Car si nous nous taisons, nous signifions à nos persécuteurs que leur persécution est
justifiée et que nous méritons ce que nous subissons."
Pour ma part, j'attends de la suite des évènements une vraie prise de conscience qu'une guerre
culturelle est en cours et que celle-ci réclame discernement et donc échanges et rencontres, unité et complémentarité dans l'action et donc esprit de réseau, (ré)investissement
renouvelé des laïcs chrétiens dans la Culture et la Cité en règle générale et par conséquent une formation adéquate. Je vois bien un lieu transversal pour cela !
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